Le "Poilievre Show" : Sous le signe du M.A.G.A. (Make the Autres Great Again)
Par Suzy Wong
Il faut se rendre à l'évidence : M. Poilievre ne fait pas de la politique ; il produit une téléréalité. Et l'inspiration est claire comme de l'eau de Javel. Son style, cette "trumperie" à la canadienne, n'est pas seulement un emprunt, c'est un hommage appuyé qui coûte en crédibilité ce que coûte un condo à Vancouver : une fortune.
La multiplication de slogans : Le Menu Dégustation de la Polarisation
Là où un politicien normal propose des politiques, Poilievre lance des slogans-missiles. Il ne veut pas convaincre les modérés, il veut juste leur offrir une crise d'urticaire.
L'exemple Trumpien : Le "Drain the Swamp" (Assécher le marais) et le fameux "Build the Wall" (Construire le mur) — des phrases simples, percutantes, qui remplacent toute plateforme complexe.
L'exemple Poilievrien : On se souvient du classique « Gatekeepers » (les gardiens), transformé en un ennemi abstrait qui cause tous les malheurs du Canada. Plus récemment, le fameux « Axe the Tax » (Éliminer la taxe) qui est crié comme si l'Impôt Fédéral était un dragon cracheur de feu et non un outil de financement.
Le résultat : Ces phrases-chocs sont parfaites pour les TikToks et les gazouillis, mais elles agissent comme un repoussoir à modérés. Les électeurs du centre, ceux qui exigent un minimum de nuance, regardent ça et se disent : « Ah, non. Je ne monte pas dans ce manège. » Le PC cherche l'unité en chassant ceux qui sont trop polis pour participer à une foire d'empoigne. Brillant!
2. L'attaque sur l'État de droit : De la cour de justice à la cour d'école
C'est ici que M. Poilievre prend le risque d'échanger sa cravate contre une camisole de force démocratique. Franchir la ligne dangereuse de l'État de droit n'est pas un pas, c'est un saut sans parachute.
L'exemple Trumpien : L'obsession pour l'emprisonnement d'Hillary Clinton (« Lock Her Up! »), puis les assauts répétés contre le FBI, le DOJ, et la notion même de justice impartiale. L'idée étant que si la loi ne sert pas ses intérêts, elle est corrompue.
L'exemple Poilievrien : Évoquer publiquement l'emprisonnement d'un premier ministre (sans accusations, sans procès, juste sur la base d'un tweet indigné). Ou encore, remettre en cause la probité de la GRC (la police fédérale), l'institution qui est censée être le symbole de l'impartialité.
Le résultat : Il donne l'impression que s'il est au pouvoir, la justice ne sera qu'une extension de son bureau. Les institutions démocratiques sont éviscérées à coups de déclarations chocs. Et la crédibilité nationale prend un coup de poignard. C'est comme si on engageait un plombier qui passe son temps à insulter les tuyaux. On se demande si le but est de gouverner ou de faire exploser la plomberie!
En somme, Poilievre a regardé la recette du succès de son voisin du Sud et a décidé de l'appliquer au Canada, où le style est traditionnellement l'équivalent d'un documentaire sur les castors. C'est une stratégie audacieuse pour un pays qui préfère la beigeur à la flamboyance : il polarise l'électorat avec une efficacité redoutable, mais en éloignant ceux qu'il doit absolument séduire. Un vrai génie... du sabordage centriste.
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