Un guide de survie pour la courtoisie numérique

 Par Suzy Wong

Pour faire suite à un excellent petit texte  À l’aire du numérique, de la téléphonie sans fil … de Francis 

Ma réponse:

La révolution du texto a tout viré de bord dans notre manière de jaser, pis avec ça, ben nos expressions aussi. Fini le temps où tu pouvais carrément raccrocher au nez de quelqu'un. Maintenant, tu laisses tes chums sur lu, pis ça, c'est pas mal l'équivalent d'une bonne vieille tape dans face au Moyen Âge. C'est cruel, point à la ligne.

Y'a déjà eu une époque où un appel sans réponse voulait dire que le téléphone était débranché. Aujourd'hui, on appelle ça un silence radio volontaire, souvent interprété comme un signe que l’autre a été kidnappé par les ti-gris, ou, plus probablement, qu'il t'évite comme la peste.

Avant, on se mettait en appel en attente, un petit clic qui voulait dire "je t'écoute, mais je peux pas te parler". Maintenant, on écrit en attente, pis ça, ça veut dire "je te lis, mais je peux pas te répondre parce que je suis en train de faire d'autres choses, comme écouter des vidéos de chats qui se font peur".

Pis que dire de l'art de la conversation? On décroche plus le téléphone, on lit un message. On se coupe plus la parole, on coupe le texte de l'autre, ce qui est pas mal plus subtil, pis donc, pas mal plus lâche.

Pour finir, il y a la triste réalité de parler dans le vide, qui, à l'ère du numérique, a été remplacée par écrire dans le vide. C'est le moment où tu envoies un message à un de tes amis, pour jamais avoir de réponse, ni de signe de vie, un moment où tu réalises que tes blagues sont peut-être pas si drôles que tu pensais.

Si on fait court:

• Appel en attente : Texte en attente
• Avoir de la difficulté à se parler : Avoir de la difficulté à se lire
• Raccrocher au nez : Vu et ignoré ou Laisser sur « vu »
• Décrocher le téléphone : Lire le message
• Couper la parole : Couper le texte
• Parler dans le vide : Écrire dans le vide
• Téléphone qui ne répond pas : Silence radio (ça peut toujours s'appliquer, mais dans le contexte des textos, ça prend une nouvelle dimension)

Le Far West du Texto

Le Far West du texto, c'est pas mal la meilleure image pour décrire ce grand n'importe quoi où on essaie de pas se faire passer pour des ti-counes.

Pis tes expressions? On dirait que tu lis dans mes pensées, c'est en plein ça! On va les mettre direct dans la grosse liste des affaires à pas faire si on veut garder ses amis.

Le ghosting : 

Vraiment, c'est la version moderne du "je te salue plus,

c'est fini, on se revoit pu". C'est l'équivalent de se cacher

derrière un char pour pas avoir à dire bonjour.

Le seen-zoning : Ça, c'est la pire affaire! C'est comme si

le monde avait un petit bouton "Je m'en calisse" sur leur

cell et qu'ils pesaient dessus juste pour te faire chier. C'est

l'ultime affront, un vrai coup de poignard en plein cœur de

ton estime de soi.

Le double-texting : On se sent tous un peu mal après

avoir fait ça, on a l'air d'un épais qui attend un peu trop

après son pote. C'est le petit moment de faiblesse qu'on

voudrait tellement effacer, mais on a pas de "undo" sur un

cell!

Pis les mots pour les gestes, c'est juste trop drôle!

Le lancer un SOS : Ça, c'est pour les plus braves. Faut

être pas mal désespéré pour se lancer là-dedans, c'est

comme lancer une bouteille à la mer, mais avec une

grosse perche pour être sûr que ça touche à terre.

Le pénis (ponctuation ignorée) : Hahaha! Ça, c'est mon

préféré. C'est le style du gars qui se fout de tout, il est

"trop cool pour mettre des virgules". C'est comme s'il te

disait "Hey, t'as compris, non? On est pas au CEGEP!".

Le p-p-p-p (ponctuation de panique) : T'as tellement

bien cerné la chose! On dirait que le cell nous donne des

tics nerveux, c'est comme le syndrome de la manette qui

tremble quand on est trop excité.

Non mais, c'est vrai, on passe notre temps à se faire des films avec des signes et des emojis. On interprète tout, on s'invente des histoires, on se demande si le petit point bleu veut dire quelque chose. En tout cas, c'est le fun d'en parler, ça nous rappelle qu'on est pas les seuls à trouver ça un peu weird.