Le modèle « Logement d'abord » comme point de départ

 Par Suzy Wong



Suite du texte sarcastique : LE NOUVEAU OU LA NOUVELLE "TOP GUN" DE L'ITINÉRANCE : PARCE QU'UN PROBLÈME DE RUE, ÇA SE RÈGLE AVEC UNE LIMOUSINE ET DES POWERPOINTS

S'attaquer à l'itinérance, c'est pas mal plus compliqué que de faire son épicerie le dimanche. Y'a pas de "solution facile" sur la tablette. Le problème est un gros plat de nouilles pas démêlées : manque de logements, pauvreté, la santé mentale qui vire au vinaigre, pis des dépendances qui te tirent vers le fond. Mais les experts, ces génies qui nous sortent des solutions quand les politiciens brassent de l'air, s'entendent pour dire qu'il faut y aller avec une approche combinée. Ça fait du sens, si tu veux pas juste mettre un pansement sur une jambe de bois.

Le fameux « Logement d'abord », ou comment enfin avoir du gros bon sens

Toute la patente du Logement d'abord (Housing First), c'est une affaire qui marche partout dans le monde, sauf, on dirait, là où on a des élections à tous les quatre ans. L'idée, c'est de dire : "Hé, au lieu de demander à quelqu'un d'arrêter de boire, de se soigner ou de devenir un moine bouddhiste avant d'avoir un toit, on va lui donner un logement, point." C'est comme si t'essayais d'apprendre à nager à quelqu'un dans un avion en plein vol. Donne-lui de l'eau en premier, tabarnouche! Pis une fois qu'il a un toit, c'est pas mal plus facile de lui donner un coup de main pour ses autres problèmes. C'est pas mal plus payant aussi pour la société que de gérer les crises dans la rue.

L'accompagnement qui fait du bien... pis qui coûte moins cher

Donner un logement, c'est bien, mais c'est pas suffisant. Faut pas juste leur passer les clés, pis les laisser se débrouiller. Ça prend du soutien concret qui a de l'allure. Pis on s'entend, ça inclut de la vraie aide pour la santé mentale, la toxicomanie, pis des affaires pour trouver une job. Faut les aider à se remettre sur pied. C'est un peu comme si tu t'achètes une voiture, mais qu'on te donne pas les pneus avec. Ça roule, mais pas bien loin.

Prévenir, c'est mieux que de guérir, pis c'est pas mal plus simple

On dirait que nos gouvernements aiment ben ça s'attaquer au feu une fois que toute la maison est brûlée. Mais le gros bon sens, c'est de prévenir. Si on investissait vraiment dans le logement social, dans le vrai, pas juste celui qu'on voit dans les PowerPoints, on aurait moins de monde dans la rue. Aider les familles à ne pas se faire évincer, c'est pas mal plus efficace que de construire des refuges après coup.

La coordination qui fait du sens

Pour que ça marche, faut que tout le monde se parle. Le fédéral, le provincial, le municipal, pis les organismes communautaires... Faut que ça soit une vraie équipe. Pis le financement, faut qu'il soit stable. Pas de l'argent au compte-gouttes, comme un don de charité. Parce que c'est pas en mettant un pansement de 100 000 dollars sur une plaie béante qu'on va la guérir, tsé.

La preuve est là, on le sait, mais on le fait pas

Y'a des pays qui ont compris ça. La Finlande par exemple, ces petits génies de l'Europe, ont presque réglé le problème de l'itinérance en 2008 en transformant les abris temporaires en logements permanents. Aux États-Unis, Salt Lake City en Utah, une ville qu'on associe pas nécessairement à des hippies, a fait la même chose, pis ça a marché en sacrament. Pis à Lisbonne au Portugal, ils ont mis en place un gros plan qui inclut du logement, des services, pis de la réintégration sociale.

En gros, la solution, c'est pas un nouveau "top gun" en limousine qui va faire des shows de boucane pour impressionner la galerie. C'est du gros bon sens, des investissements, pis surtout, de l'humanité. Ça prend du monde qui veut vraiment aider, pas juste des gestionnaires qui font des plans sur la comète.


Voici maintenant un petit conte : 

LE ROI DE BERRI

À Montréal, juste à sortie du métro Berri-UQAM, y'avait un gars que tout le monde connaissait sans l'connaître. C'était Gilles. Gilles, c'était pas mal le roi de son p'tit bout de béton. Son trône, c'était une caisse de lait en plastique, pis sa couronne, une vieille tuque des Canadiens, même en plein été. Chaque jour, y'avait une nouvelle pancarte en carton avec une phrase pour faire réfléchir ou pour faire rire le monde pressé.

Dans le flot de monde qui passait sans jamais s'arrêter, y'avait Chloé. Une étudiante de l'UQAM, toujours en train de courir entre deux cours, la tête pleine de livres pis de deadlines. Pour elle, Gilles, c'était juste une partie du décor, comme les cônes orange ou le bruit des sirènes. 
Mais un mardi de novembre, un de ces mardis où le vent frette te rentre dans les os, Chloé a ralenti. La pancarte de Gilles était différente. Pas de joke, pas de philosophie de ruelle. Juste deux mots, écrits d'une main tremblante :      
« J'ai faim. » Ça l'a frappée drette dans le cœur.

Chloé a pas fouillé dans ses poches pour trouver du change. Elle a fait demi-tour et est entrée dans le premier dépanneur. Elle est ressortie avec deux roteux bien chauds pis un grand café. Sans trop savoir quoi faire, elle s'est approchée et a tout simplement tendu la nourriture à Gilles. 

« Quessé tu veux? » qu'y'a marmonné. Mais l'odeur de la bouffe a eu le dessus. Y'a pris le roteux et a commencé à manger en silence. Chloé s'est assise un peu plus loin, sur les marches froides. Y'ont pas parlé, mais dans le silence, y'avait quelque chose de moins lourd que d'habitude. Pour la première fois depuis longtemps, Gilles se sentait pas invisible.

C'est devenu leur p'tit rituel. Chaque jour, Chloé prenait cinq minutes pour jaser avec Gilles. Elle lui apportait un café, pis y'y racontait des bouts de sa vie d'avant. Y'avait été bûcheron en Abitibi, un « gars de bois », comme y disait. « J'étais pas un peureux dans ce temps-là, » qu'y'a dit un jour, avec une lueur de fierté dans les yeux fatigués.

Un jour, Chloé est arrivée avec un de ses amis, Marc, un grand gars tranquille qui travaillait dans une maison de quartier. Marc a serré la main de Gilles, sans le regarder de haut. Y'a pas fait de grands discours, y'a juste parlé du centre, un endroit où on pouvait avoir un lit au chaud pis de l'aide pour se « r'placer les pattes ».

Gilles était pas sûr. La rue, c'est dur, mais au moins, tu connais les règles. Un nouvel endroit, ça faisait peur. « On verra ben, » qu'y'a dit, sans trop y croire. Mais cette nuit-là, le froid est devenu mordant. Un vrai frette de canard qui te gèle les idées.  

Chloé et Marc l'ont cherché partout. Y l'ont trouvé, grelottant, « bleu comme une prune ». Cette fois, Gilles a pas protesté. Y était trop magané. Y l'ont aidé à se lever et l'ont emmené jusqu'au refuge. En entrant, la chaleur l'a frappé comme un coup de poing. On lui a donné une soupe aux pois épaisse pis on l'a mené à un lit.

Un mois plus tard, Chloé est passée au refuge. Un homme, rasé de frais et habillé proprement, passait la moppe dans le corridor. Y'a levé la tête et lui a souri. C'était Gilles. Ses yeux étaient clairs. « Salut, la grande, » qu'y'a dit. « Merci, hein. » Y'était pus le roi de Berri. Y'était juste Gilles. Pis pour l'instant, c'était pas mal plus qu'assez.


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