L a comédie des étiquettes
Par Suzy Wong
La gauche, c'est un peu le chum qui est toujours là pour te prêter un 20 piastres, même s'il est raide comme la justice. Ils sont pour le progressisme et le changement social, ce qui veut dire qu'ils veulent brasser la cage à tout bout de champ, juste pour voir si ça va tomber sur le côté. Pour eux, l'égalité est la seule chose qui compte. Peu importe que tu aies bûché comme un fou pour avoir ta business ou que tu aies passé ta vie sur le divan à écouter LCN, tu mérites la même patente. C'est l'idée que tout le monde devrait avoir la même part du gâteau, même s'il y en a qui ont jamais mis la main à la pâte.
La droite, c'est le contraire. C'est le boss qui te dit de te relever les manches si tu veux t'en sortir. Pour eux, le conservatisme et les traditions, c'est pas négociable. Si ça a toujours marché de même, pourquoi changer? Ils croient à la hiérarchie et au mérite, ce qui veut dire que si tu as une cabane au fond des bois, c'est de ta faute, et si tu as une maison avec une piscine creusée, tu l'as mérité. Pour eux, le monde est un peu comme une partie de hockey : les meilleurs vont marquer des buts, les autres vont rester sur le banc.
Si on caricature davantage: La gauche, c'est ce chum en santé mentale qui te parle de la poutine comme s'il s'agissait d'un outil de l'oppression capitaliste. Il veut un Québec où on partage les fèves au lard de façon équitable, où l'on n'a pas à se soucier de payer pour les autres, car on paie tous pour tout le monde. La droite, c'est ce propriétaire de chalet qui t'explique qu'il est juste un peu plus intelligent que toi, et que si t'es pas propriétaire d'une maison, c'est que tu as juste pas travaillé assez fort. La droite ne veut pas de l'égalité, elle veut que les « meilleurs » aient les meilleures choses, comme si la vie était un jeu de quilles.
Les extrêmes
Et si on pousse la cassette un peu plus loin, la gauche radicale, c'est la gang qui pense que le capitalisme est le diable et qu'on devrait tout nationaliser. C'est un peu comme s'ils voulaient que la SAQ gère tout. Ils sont tellement dans l'égalité qu'ils sont prêts à faire un nivellement par le bas pour que tout le monde soit au même niveau, même si ça veut dire être dans la misère. La droite radicale, eux, c'est la gang de mononcles qui pensent que la souveraineté est une affaire de race et que l'identité est le plus important. Ils croient que si t'es pas de chez nous, tu n'as rien à faire ici. C'est le genre de personne qui trouve que le mur de Trump était une bonne idée.
Les extrêmes sont une version encore plus absurde de la politique. La gauche radicale voudrait nationaliser tous les restaurants, pour que la nourriture soit « pour le peuple » et non pour le profit. La droite radicale voudrait que l'on n'ait pas de restaurants du tout, et que chacun se débrouille pour manger avec ses propres moyens. Et s’il existait l'extrême centre? L'extrême centre, ce serait ce politicien qui te dit que la solution est de couper la poire en deux, et que la gauche devrait avoir la moitié des restaurants, et la droite, la moitié des restaurants.
L'Extrême Centre
Mais qu'est-ce que ce serait un extrême centre? Ce serait quelqu'un qui est prêt à faire de compromis, mais qui est tellement intense dans sa modération qu'il est prêt à s'obstiner avec tout le monde. C'est l'idée que le bon sens est la seule chose qui compte et que si tout le monde l'appliquait, on vivrait dans un monde parfait. C'est un peu comme un arbitre qui est tellement strict avec les règles qu'il expulse les deux équipes du terrain. C'est l'idée de prendre le meilleur des deux mondes et de rejeter le pire. Un extrême centre serait un mélange de discipline et de flexibilité, de respect des traditions et d'ouverture au progrès. Le seul problème, c'est que l'idée de "modéré" est tellement plate pour la plupart des gens qu'elle ne rallie personne.
Les extrémistes sous un autre jour
Si les tradwives — ces femmes au foyer à l'ancienne — devenaient des extrémistes de gauche, elles ne feraient plus de la cuisine pour leur homme, mais des collectes de bouffe végane pour les sans-abris. Leur jardin serait un potager communautaire où tous les légumes sont collectivisés, et le mari ne serait plus le chef de famille, mais un co-parent égalitaire qui doit absolument savoir faire la pâte à tarte. Au lieu de se vanter de leurs enfants polis et bien habillés, elles se vanteraient d'avoir élevé des jeunes militants qui participent à toutes les marches.
Quant aux gars du mouvement MAGA, s'ils tombaient dans l'extrême gauche, ils seraient les premiers à organiser des manifestations pour la nationalisation des usines de Ford. Leurs casquettes « Make America Great Again » seraient remplacées par des casquettes où il serait écrit « Occupy Wall Street ». Au lieu de prêcher pour un retour aux valeurs de l'Amérique des années 50, ils revendiqueraient un retour à un système politique où les travailleurs sont maîtres de leurs entreprises. L'idée de "travailler dur" serait remplacée par celle de "lutter collectivement". Ils n'auraient plus de fusils, mais des pancartes pour les droits des travailleurs.
Si les membres de Québec solidaire devenaient des extrémistes de droite, la première chose qui changerait, c'est qu'ils arrêteraient de parler de tout le monde et se concentreraient uniquement sur la souveraineté. Mais pas la souveraineté inclusive qu'on connaît. Non. Ce serait une souveraineté identitaire, où l'on se soucie uniquement des "vrais" Québécois, c'est-à-dire ceux qui parlent un français très coloré et qui mangent de la tire sur la neige. Ils seraient les premiers à exiger un mur à la frontière de l'Ontario, pour protéger la « pureté » de la culture. Leurs discours ne porteraient plus sur la justice sociale, mais sur le mérite, l'ordre et l'autorité, avec des slogans comme : « Québec d'abord, on s'en crisse du reste du monde. » Au lieu de militer pour les droits des femmes, ils en feraient une affaire de fierté québécoise, en exigeant que chaque mère de famille reste à la maison pour préserver la démographie. Bref, ils troqueraient le drapeau arc-en-ciel pour le drapeau des Patriotes.
Et les wokes, s'ils tombaient dans l'extrême droite? Ce serait le début du bordel! Ils passeraient d'une idéologie où tout le monde a des droits à une idéologie où la hiérarchie est la seule chose qui compte. Au lieu de se battre pour que les gens puissent choisir leur genre, ils se battraient pour que les gens qui choisissent leur genre soient classés selon leur "valeur" sociale. Les minorités ne seraient pas défendues pour des raisons d'égalité, mais de tradition et de fierté. Leurs discours ne seraient plus sur la discrimination, mais sur le mérite et la force. Leur slogan ne serait plus "La diversité, c'est notre force" mais "La diversité, c'est la tradition".
Conclusion
Finalement, toutes ces belles étiquettes-là, c'est juste un ramassis de clichés pour faire semblant qu'on se comprend. On s'obstine sur des mots comme si c'était des vérités universelles, mais au bout du compte, on est tous pognés à essayer de trouver notre place dans le même bordel. On est si occupés à se pointer du doigt qu'on oublie qu'on est tous dans le même bateau, un bateau qui coule, pis que la seule chose qui nous sépare, c'est la couleur de nos bouées.
En gros, on s'invente des guerres de clochers pour ne pas avoir à se regarder le nombril et voir qu'au fond, on est tous aussi niaiseux. Tout ce qu'on fait, c'est se mettre des étiquettes pour avoir l'air de faire partie de quelque chose, comme un enfant qui choisit son camp dans un jeu de ballon prisonnier, juste avant de se faire ramasser.
Si on suit la logique de toutes ces caricatures, les extrêmes des extrêmes finiraient par se retrouver dans une chambre d'hôtel miteuse pour un genre de bed-in grotesque. On aurait un gars de la droite identitaire, en cravate et en bas de laine, assis sur le matelas à côté d'une militante de la gauche radicale, qui tricote une écharpe en laine de yak équitable. Ils se regarderaient avec méfiance en se demandant s'il n'y a pas un complot derrière tout ça, mais à force de se voir la face, ils finiraient par se rendre compte qu'ils sont tous les deux aussi tannés de leurs propres idées. Ils partageraient un café, puis une poutine, et ils finiraient par conclure que toutes ces guerres d'étiquettes, c'était juste un gros spectacle pour les enfants, une pièce de théâtre jouée par des adultes qui ont oublié de grandir. Et sur le mur de la chambre, on pourrait voir une image de John Lennon et Yoko Ono, qui les regardent d'un air à la fois approbateur et déconcerté.
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