Un Québec laïque et inclusif : le défi de la cohérence

 Par Suzy Wong


Texte dédié à un ami Qlubien @simon_duchesneau@plus.qlub.social avec lequel on a eu une belle conversation 💬 ce matin (zéro ironie)


Qu'est-ce qui menace notre «mode de vie»? Autopsie de nos inquiétudes

Le Québec et ses épouvantails : autopsie d'une crise imaginaire

Ah ben tabarnouche, on a encore des patates chaudes à gérer, hein? Parlons-en donc de cette nouvelle vague de « progrès » qui déferle sur notre belle province, pis qui, apparemment, menace tellement notre « mode de vie » qu’on en perd le sommeil.

Voyez-vous, ces temps-ci, on s’émeut drôlement vite pour des peccadilles. Un p’tit gars qui se questionne sur son identité? Crise nationale! Des toilettes où tout le monde peut faire sa petite affaire sans se sentir jugé? L’apocalypse, j’vous dis! Puis les fameuses  « drag queens » qui osent lire des contes à nos chérubins dans des lieux publics? Là, c’est carrément la fin du monde tel qu’on le connaît. On dirait qu’on a peur que nos enfants se transforment en licornes à paillettes du jour au lendemain.

Pis parlant de ça, les drag queens, c’est pas nouveau, tsé! Dans les années 80-90, on en croisait déjà un peu partout, dans les bars, dans certains spectacles, pis ça a rien changé dans ma vie, que je sache. On n’est pas tous devenus des adeptes du maquillage extravagant et des robes à paillettes, que je me rappelle.

Pis parlant de « avant », on va se rappeler un p’tit peu le bon vieux temps, voulez-vous bien? Avant, un garçon efféminé mangeait une raclée dans la cour d’école sans que personne ne s’en offusque outre mesure. C’était ce qu’on appelait « l’école de la vie », paraît-il. Pis deux femmes lesbiennes? Ah ben elles se cachaient ben comme il faut sous le couvercle de « bonnes colocataires » ou de  «meilleures amies du monde », question de pas trop froisser la sensibilité de la majorité. Drôle de progrès, quand on y pense. On préférait fermer les yeux sur la souffrance et l’injustice, mais au moins, « nos valeurs » étaient sauves, n’est-ce pas?

Mais dites-moi donc, la gang, qu’est-ce que ça vous enlève concrètement, toute cette affaire-là? Est-ce que votre café du matin goûte moins bon? Est-ce que votre hypothèque a augmenté subitement? Est-ce que votre équipe de hockey préférée a perdu un match à cause de ça? Non. Pantoute.

On dirait qu’on a une sainte horreur du changement, hein? On préfère s’accrocher à nos vieilles certitudes rouillées comme à la prunelle de nos yeux. « C’était mieux avant!» qu’on braille à tue-tête. Ah oui? Avant quand? Quand on n’avait pas l’électricité? Quand les femmes n’avaient pas le droit de vote? Quand les hommes homosexuels se mariaient à une femme pour être considérés normaux? Drôle de conception du « mieux », me semble.

Faut croire que le plus grand danger qui nous guette, c’est pas la hausse du coût de la vie, ni les changements climatiques, ni Trump, ni les nids-de-poule gros comme des cratères sur nos routes. Non. Le vrai péril, c’est que quelqu’un d’autre vive sa vie un peu différemment de nous. Quelle tragédie!

Alors, la prochaine fois que vous entendrez parler de ces « menaces » à notre société, prenez une grande respiration, pis demandez-vous sincèrement : « Est-ce que ça me change vraiment de quoi, dans le fond? » Y’a de fortes chances que la réponse soit non. Pis si c’est le cas, ben, peut-être qu’on pourrait collectivement trouver des vrais problèmes à régler, au lieu de s’acharner sur des épouvantails qu’on se crée nous-mêmes. Tsé, juste de même, pour le fun.

Une chose est de tolérer, une autre d'afficher : le voile dans la fonction publique

Ah ben là, on arrive à une autre paire de manches, hein? Effectivement, la promotion active du port du voile par l'État, c'est une bibitte un peu différente qui peut chatouiller davantage nos convictions. Je comprends tout à fait que de voir des symboles religieux ostentatoires affichés à l'hôtel de ville ou dans la fonction publique, ça ne fasse pas nécessairement partie de votre vision d'un Québec laïque. Moi non plus, d'ailleurs. On a quand même débattu fort pour séparer l'Église de l'État, ce n'est pas pour revenir en arrière en catimini.

C'est une chose de tolérer le port de signes religieux discrets par des individus qui vaquent à leurs occupations, que ce soit dans une cafétéria scolaire ou un hôpital. Après tout, les sœurs grises du Bon Pasteur à Sainte-Foy m’ont enseigné le primaire, l'habit ne fait pas le moine, et ça n'a pas nécessairement d'impact sur la qualité du service rendu. On a tous croisé des gens compétents et dévoués, peu importe leur accoutrement ou leurs croyances personnelles.

Mais quand l'État se met à endosser ou à afficher des symboles religieux, là, ça soulève des questions légitimes sur la neutralité de l'État et sur le respect de la liberté de conscience de tous les citoyens, croyants ou non. On n'est pas une théocratie, que je sache. Montréal, c'est une métropole cosmopolite où cohabitent une multitude de cultures et de convictions, et l'espace public doit, en principe, être un lieu neutre où chacun se sent inclus, sans que l'une ou l'autre religion ne soit mise de l'avant par les institutions.

Alors, oui, il y a une nuance importante à faire entre la liberté individuelle de porter ce qu'on veut dans sa vie de tous les jours et l'idée que l'État devrait activement promouvoir un symbole religieux particulier. C'est une discussion complexe, mais c'est sain qu'on puisse en parler sans se faire traiter de tous les noms. Après tout, on essaie juste de bâtir une société où chacun trouve sa place, sans que ça se fasse au détriment des principes fondamentaux qu'on s'est collectivement donnés.  Malheureusement, ce n’est pas avec le gouvernement actuel (la CAQ) que ça arrivera!




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