Recevoir un diagnostic : un retour dans le temps

J'adore mon domaine d'études, je considère que j'aurai la chance de pratiquer un métier vraiment merveilleux dans peu de temps. Quand je regarde le chemin parcouru, je trouve que j'ai été forte. Après tout, commencer des études en éducation spécialisée, 3 mois et demi après avoir reçu le diagnostic de TSA de mon propre enfant, ça aurait pu être de la torture.

Maintenant rendue à ma dernière session, je dois faire face à un travail pour un cours où l'on étudiera des situations de familles en crise, suite à l’annonce d’un diagnostic. Cela fait maintenant près de 3 ans que moi et mon mari avons vécu cette situation et, malgré le fait que beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis, je crois que ce seront le cours et le travail qui me demanderont le plus de force et de courage.

Dans mon cœur de maman, je savais que mon Willie était autiste depuis qu'il avait 3 ans et j'avais des doutes sur son développement depuis qu'il avait 15 mois environ.  Malgré tout ça, même si je me rendais au rendez-vous en sachant très bien ce que j'allais y entendre, même si j'étais accompagnée de mon mari (qui était aussi lucide que moi sur la situation), même si j'avais avec moi la meilleure TS du monde qui nous avais supportés depuis le début du processus, même si j'ai une mauvaise mémoire et que mon passé est souvent un brouillard... ce moment-là, je ne pourrai jamais l'oublier.

En fait, je ne pourrai jamais me souvenir de ce qui a été dit, parce que je n’écoutais pas vraiment. Je voulais juste entendre leurs conclusions. J’avais juste hâte de savoir s’il y avait un diagnostic précis, ma crainte ultime étant de n’avoir comme conclusion du rapport d’évaluation qu’une «possibilité de» quelque chose. Comme vous le savez sans doute, sans diagnostic, pas de cote et, sans cote, pas de service à l’école!

Voulant le meilleur pour mon fils, je considérais qu'un diagnostic de TSA pour l’envoyer en classe adaptée dès la maternelle ce l'était. J’avais donc très hâte que la pédiatre aboutisse et qu’elle nomme enfin ce que je voulais entendre.

«… nous arrivons donc à la conclusion d’un trouble du spectre de l’autisme…»

Sans le savoir, depuis des années, j’avais construit de solides digues pour retenir toute ma douleur de maman face aux difficultés de mon garçon. La culpabilité de ne jamais en faire assez, de possiblement être responsable de ses difficultés, l’isolement obligé dû à son niveau d’agressivité et ses crises, les nombreux deuils qui parsèmaient notre vie depuis sa naissance… tout ça m’avait pété dans la face.  À ce moment précis,les digues ont sauté et le torrent a tout envahi.

On me disait que c’était normal d’avoir de la peine, que l’on avait toujours l’espoir que ce n’était pas ça, etc. Cela m’avait frustrée. Non, je n’espérais pas entendre autre chose, bien au contraire. J’imagine que c’est d'ailleurs uniquement à ce moment là que je me suis autorisée à vivre ma souffrance. Je ne sais pas vraiment comment l’expliquer. Ça a sorti tout seul, spontanément et intensément. Des fois, il faut juste vivre ce que l’on a à vivre, sans chercher à le justifier par quoi que ce soit.

Près de trois ans plus tard, je ne peux écrire ces lignes sans avoir des larmes qui coulent sur mes joues. Je n’ose pas imaginer ce que cela doit être de vivre cela sans y être préparé comme moi je l’étais à l’époque!

Véronique Delorme

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